5 questions au Dr Alain Vadeboncoeur
1. Pourquoi souhaitiez-vous devenir médecin?
En fait, j'aimais surtout les sciences pures, les mathématiques en particulier. Je n'avais jamais vraiment songé à devenir médecin, mais j'ai soumis une demande d’admission en médecine à tout hasard. Je me souviens être allé à l'entrevue en t-shirt, souliers de course et jeans usés. Ayant été admis en mathématiques et en médecine à l'Université de Montréal, je devais faire un choix. Cinq minutes avant la fermeture du Bureau du registraire, j'ai finalement coché « Médecine ». J'ai choisi la vie, probablement.
2. Comment se sont déroulées vos études en médecine?
Très mal au départ. Je n'appréciais ni l'ambiance, tournée vers la performance, ni l'enseignement magistral assommant. J’avais peu d’intérêt pour cette matière surabondante et ne disposais pas de la mémoire photographique de certains de mes camarades de classe ni d'une méthode quelconque d'étude. J’ai cessé d'assister à mes cours en deuxième année, puis j’ai abandonné la médecine à la fin de la troisième, pour entreprendre un voyage d'un an « sur le pouce » en Europe et en Afrique. C'est dans le désert du Maghreb, en Algérie, qu'un jeune de mon âge, sans emploi et probablement tuberculeux, m'a fait comprendre à quel point j'avais été stupide d'abandonner mes études.
J’y suis revenu, un peu rouillé, l'année suivante et, après un stage d’externat mitigé en psychiatrie, j’ai plongé dans l'univers chirurgical de l'hôpital Notre-Dame. C’est à ce moment que le déclic s’est produit : j'adorais l'hôpital et soigner des patients! Un jour où j'étais le seul externe en chirurgie, j'ai dû prendre soin de tous les patients de l'étage. Mon patron avait alors noté dans mon évaluation : « Se révèle vraiment quand on lui confie des responsabilités ». Cela m'a fait du bien : pour la première fois depuis le début de ma formation, je me sentais à ma place.
Depuis, je n'ai jamais regretté mon choix, ayant toujours aimé la pratique hospitalière, à laquelle j'ai consacré ma carrière. J’ai toutefois gardé une certaine nostalgie pour les maths et la physique.
3. Avec qui travaillez-vous le plus en équipe?
Comme urgentologue, j'ai toujours trouvé fascinant ce travail à plusieurs expertises où tout le monde (médecins, infirmières, préposés, inhalothérapeutes, technologues, commis, etc.) collabore dans un même but : sauver le patient. Comme chef d'urgence pendant 27 ans, j'ai travaillé de très près avec des infirmiers et infirmières-chefs qui ont été mes principaux partenaires professionnels. Comme gestionnaire, j'ai aussi fait équipe avec les directions et d’autres chefs. Dans toutes mes sphères d’activités, j'ai travaillé avec des gens passionnés, compétents et inspirants, qu'il s'agisse d'avocats pour les causes légales, de coroners, de gens des médias, d'artistes, d'éditeurs, etc. Tous m'ont beaucoup appris. Il demeure que le premier équipier, c'est toujours le patient.
4. Quels enjeux de santé vous préoccupent le plus?
Les enjeux qui posent le plus problème actuellement sont l'accessibilité, qui requiert un travail continu sur le système de santé; l'équité, qui passe par la défense d’un système public de santé fort et par son amélioration; l'humanisme, qui demande une attention constante à l'humanisation des soins; et la prévention, parent pauvre de notre système de santé, au potentiel pourtant énorme.
5. Quelle est, à votre avis, la responsabilité sociale du médecin?
Sa responsabilité est d'abord envers ses patients, en agissant auprès d'eux avec un grand respect, en s’intéressant à la personne au-delà de la maladie, en travaillant à ce que chaque rencontre soit la plus égalitaire et ouverte possible, et en acceptant qu'il y a beaucoup à apprendre d'eux.
Ensuite, le médecin doit accepter de relever les défis quotidiens du réseau de la santé, c'est-à-dire s'y investir pleinement pour contribuer à l'améliorer, sans jamais démissionner de ce rôle, malgré les difficultés évidentes. Il doit aussi prendre la parole, dans son milieu ou même publiquement, lorsqu'il constate des faits et réalités contraires à ses convictions.
Enfin, il doit rester fidèle à la médecine elle-même, en acceptant avec humilité de demeurer toute sa vie un apprenant, en reconnaissant ses limites et ses erreurs, et en acceptant la nécessité d'évoluer avec les données de la science et de remettre en cause ses habitudes.
Le Dr Alain Vadeboncoeur en 3 faits saillants
- Urgentologue, professeur et chercheur, il a toujours priorisé la transmission et la vulgarisation des connaissances scientifiques.
- Auteur apprécié du grand public, il a publié cinq essais, une pièce de théâtre, un recueil de nouvelles et quelque 400 textes pour le magazine L’actualité.
- Très suivi dans les médias sociaux, il y encourage les saines habitudes de vie, déboulonne certains mythes et offre son point de vue sur le système de santé.
Dr Alain Vadeboncoeur,
Urgentologue
Le Dr Alain Vadeboncoeur est finaliste dans la catégorie Rayonnement des Distinctions du Collège.