5 questions au Dr Jean-Claude Forest
1. Pourquoi souhaitiez-vous devenir médecin?
Cela remonte au début des années 1950, alors que j’avais environ 5 ans. Mes parents étaient cultivateurs et, un jour, alors que je souffrais d’une infection cutanée, ils ont dû appeler le docteur, un médecin de campagne qui effectuait des visites à domicile. Après m’avoir examiné, le médecin décida de m’injecter un médicament dans la fesse. Quelques jours après, j’étais guéri! Cette expérience m’a impressionné, d’autant que je n’avais jamais vu un docteur auparavant. C’est à ce moment que j’ai décidé que je deviendrais moi aussi médecin, afin de pouvoir soigner les enfants malades et les guérir.
Adolescent, j’ai gardé ce rêve en tête même si, n’ayant pas pu faire le cours classique, le chemin vers les études en médecine m’était inaccessible à l’époque. J’ai donc fait une première formation universitaire en agronomie, puis j’ai terminé un doctorat en biochimie. C’est durant cette période que l’occasion de m’inscrire en médecine s’est présentée. Je me suis lancé avec enthousiasme et surtout avec la volonté d’apporter une contribution significative dans un domaine de la médecine qui restait à définir.
2. Avez-vous été témoin d’un petit geste, dans le réseau de la santé, qui a amélioré la vie quotidienne des patientes et des patients?
Oui, et cette anecdote est d’ailleurs à l’origine du financement du Programme québécois de dépistage prénatal. La scène se déroule en 2009, dans le bureau du Dr Michel Bureau, alors directeur général des affaires médicales et universitaires au ministère de la Santé et des Services sociaux. À titre de président du comité de coordination du programme, je plaidais auprès du Dr Bureau afin d’obtenir un budget de démarrage. Les sommes que je demandais étaient relativement importantes, mais elles m’apparaissaient essentielles afin de réussir l’implantation du programme sur le territoire québécois, en respectant des principes d’universalité, d’accessibilité et d’équité. Le Dr Bureau m’écoutait avec bienveillance, mais je lisais plusieurs points d’interrogation et d’exclamation sur son visage. Après un moment de silence, il m’a proposé ceci : « Si je mets à ta disposition un petit montant provenant de sommes non encore dépensées dans le budget de ma direction, es-tu capable de le démarrer? » Le budget de départ qu’il m’offrait était d’à peine 400 000 $, soit bien en deçà de ce que j’estimais nécessaire. J’ai pourtant choisi de relever le défi et c’est ainsi que le Programme québécois de dépistage prénatal a humblement débuté, pour atteindre aujourd’hui un statut enviable.
Offert gratuitement dans le réseau public de santé, le Programme québécois de dépistage prénatal rend accessible à toutes les personnes enceintes du Québec, sur une base volontaire, le dépistage prénatal de la trisomie 21, de la trisomie 18 et de la trisomie 13.
3. Avec qui travaillez-vous le plus en équipe?
Dans mon cas, cette question prend plusieurs dimensions puisque ma carrière comporte de multiples facettes. Par exemple, à titre de président du comité de coordination du Programme québécois de dépistage prénatal, je travaille avec une douzaine de membres experts des disciplines concernées (médecins généticiens, obstétriciens-gynécologues, médecins de famille, médecins biochimistes, sages-femmes, technologistes médicaux, gestionnaires ministériels, etc.). En tant que chercheur, la réussite est quasi impossible sans les collaborations locales, nationales et internationales, la création de réseaux multidisciplinaires et la participation à des comités scientifiques ou stratégiques. Enfin, comme gestionnaire médico-scientifique, être entouré de personnes impliquées, créer des liens, susciter l’intérêt et favoriser un sentiment d’appartenance sont des éléments clés.
En tant que chercheur, la réussite est quasi impossible sans les collaborations locales, nationales et internationales, la création de réseaux multidisciplinaires et la participation à des comités scientifiques ou stratégiques. Enfin, comme gestionnaire médico-scientifique, être entouré de personnes impliquées, créer des liens, susciter l’intérêt et favoriser un sentiment d’appartenance sont des éléments clés.Dr Jean-Claude Forest, Médecin spécialiste en biochimie médicale
4. Quels enjeux de santé vous préoccupent le plus?
Plusieurs enjeux me préoccupent, notamment l’impact du vieillissement de la population ou encore les effets des changements climatiques et de la détérioration de l’environnement sur la santé humaine. Mais ce qui m’interpelle le plus, c’est la santé physique et mentale de nos enfants et leurs conditions de développement. C’est à cet enjeu, et plus spécifiquement à la période prénatale, que j’ai consacré ma carrière de praticien et de chercheur clinicien.
5. Comment stimuler l’innovation au sein du réseau de la santé?
L’innovation ne peut se concrétiser que si les ingrédients de base sont présents : la curiosité intellectuelle, l’agilité et la cohésion organisationnelles, ainsi que la tolérance au risque. Bien que cela représente un réel défi, il est nécessaire de développer une culture d’innovation dans nos organisations publiques.
Le Dr Jean-Claude Forest en 3 faits saillants
- Grâce à ses recherches, on peut désormais prédire plus tôt dans la grossesse le risque lié à certaines anomalies fœtales et maladies.
- Il fut le maître d’œuvre du déploiement du Programme québécois de dépistage prénatal, accessible gratuitement partout au Québec.
- En tant qu’expert international, il a joué un rôle dans la standardisation et l’harmonisation des analyses de laboratoire à travers le monde.
Dr Jean-Claude Forest,
Médecin spécialiste en biochimie médicale
Dr Jean-Claude Forest est finaliste à la catégorie Excellence des Distinctions du Collège.
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