S’engager à faire mieux, pour la santé des femmes
Éditorial au sujet de l'enquête sur les bandelettes sous-urétrales
Depuis une vingtaine d’années, les bandelettes sous-urétrales font partie des traitements employés pour traiter l’incontinence urinaire à l’effort chez certaines patientes. Alors qu’une grande majorité de femmes n’éprouvent aucun problème particulier après la pose de ce dispositif médical, d’autres femmes en ont subi ou en subissent toujours des effets indésirables.
Depuis une vingtaine d’années, les bandelettes sous-urétrales font partie des traitements employés pour traiter l’incontinence urinaire à l’effort chez certaines patientes. Alors qu’une grande majorité de femmes n’éprouvent aucun problème particulier après la pose de ce dispositif médical, d’autres femmes en ont subi ou en subissent toujours des effets indésirables. L’an dernier, deux reportages diffusés à l’émission Enquête, à l’antenne de Radio-Canada, ont exposé au grand jour le parcours éprouvant de plusieurs femmes aux prises avec ces effets désagréables, voire invalidants. Ne se sentant pas comprises ni crues, ces femmes, en quête d’une solution à leurs maux, ont cogné à de nombreuses portes pour se faire entendre. Elles ont consulté des médecins, subi des examens complémentaires, consulté d’autres professionnels de la santé. Leur douleur restait inexpliquée, la cause de celle-ci non validée et leur situation semblait alors sans issue.
Ces patientes demandaient qu’on prenne au sérieux leur appel à l’aide, et c’est ce que le Collège a fait. La décision de mener une enquête s’est vite imposée. Il fallait agir promptement au nom de la santé et du bien-être de ces femmes. Il fallait aussi rétablir leur confiance envers le système de santé québécois.
L’enquête a été menée avec la collaboration du milieu médical et, surtout, avec la contribution inestimable de plus de 400 femmes qui ont fait part de leurs expériences. Derrière leurs histoires souvent bouleversantes se trouvaient 400 éclairages essentiels qui nous ont permis de mieux comprendre la réalité vécue par ces patientes.
Au terme de cette enquête, dont le rapport contient 17 recommandations bien concrètes, le Collège souhaite qu’une approche structurée soit rapidement adoptée pour soulager d’abord et avant tout ces femmes, mais aussi pour prévenir l’apparition d’autres effets indésirables liés à la mise en place d’une bandelette sous-urétrale et améliorer la prise en charge future des patientes concernées.
La création d’un registre provincial s’impose
Au Québec, il est actuellement impossible d’obtenir l’ensemble des données relatives aux patientes ayant subi l’implantation d’une bandelette sous-urétrale. D’une part, les hôpitaux ne détiennent pas de registre remontant jusqu’à la mise en marché de ce dispositif. D’autre part, compte tenu des règles relatives à la conservation des dossiers médicaux, de précieuses informations ont été détruites et certaines femmes ignorent donc le modèle précis ou la marque de bandelette qui leur a été implantée.
Le cas des bandelettes est éloquent, mais il n’est pas isolé. Cette situation met en lumière une problématique s’appliquant à tous les types de dispositifs médicaux insérés dans le corps humain, que ce soient des implants mammaires, certaines prothèses ou un stimulateur cardiaque, par exemple. Il est primordial de se doter des outils nécessaires pour pouvoir garder la trace des patients concernés de façon à communiquer avec eux en cas de problème, et ce, même plusieurs années après l’intervention chirurgicale.
C’est pourquoi nous demandons au ministère de la Santé et des Services sociaux de créer sans tarder, de concert avec les établissements de santé, un registre provincial permanent de tout dispositif médical placé dans le corps humain. La création d’un tel registre contiendrait les informations nécessaires pour assurer un meilleur suivi des patients.
Le rapport d’enquête sur les bandelettes sous-urétrales nous a ouvert les yeux sur une situation inacceptable. Maintenant que nos yeux sont grand ouverts, il est temps de jeter un regard plus large et de proposer des solutions qui bénéficieront au plus grand nombre de patients possible.
Les femmes qui ont partagé leurs histoires dans le contexte de cette enquête sont une source d’inspiration pour aspirer à faire mieux. Et c’est ce que nous allons faire, en déployant tous les efforts nécessaires pour préserver ce lien de confiance si fragile et nécessaire entre les patients, les médecins et l’ensemble des acteurs du réseau de la santé au Québec.
Mauril Gaudreault, M.D.
Président
Collège des médecins du Québec
Nathalie Saad, M.D
Vice-présidente
Collège des médecins du Québec
Texte publié le 16 juin 2020